Les 6 arts majeurs et leur importance culturelle

Dire qu’il existe une liste universelle des arts majeurs tiendrait presque de la légende urbaine : d’un pays à l’autre, d’une époque à l’autre, ce classement bouge, s’étire, se rétracte. La France du XXe siècle s’est arrêtée à six, ailleurs on pousse le curseur plus loin, et certains refusent même l’idée d’une hiérarchie artistique.Les systèmes de classement ne cessent de se modifier, révélant des logiques parfois contradictoires. La reconnaissance officielle d’un art, son exclusion ou son reclassement témoignent de choix culturels, politiques et sociaux qui dépassent la simple appréciation esthétique.

Comprendre la classification des arts : origines et évolutions majeures

Explorer la classification des arts, c’est ouvrir un livre où chaque époque réécrit ses propres critères. Dès l’Antiquité grecque, les Muses, filles de Zeus et de Mnémosyne, sont chacune associées à une discipline bien précise : Calliope pour la poésie épique, Clio pour l’histoire, Euterpe pour la musique, Terpsichore pour la danse. Cette tradition irrigue pour longtemps la pensée occidentale, la notion d’esthétique se façonnant à l’aune de ces figures tutélaires.

Pendant le Moyen Âge, la société distingue soigneusement entre arts libéraux et arts mécaniques. Les premiers, formés autour du trivium (grammaire, rhétorique, dialectique) et du quadrivium (arithmétique, géométrie, musique, astronomie), bénéficient d’un statut supérieur, tandis que les seconds se voient confinés dans le giron de l’artisanat et du travail manuel.

Le tournant de la Renaissance marque une rupture : l’artiste s’émancipe, s’affirme, cherche l’autonomie et la légitimité pour ses créations. Plus tard, le siècle des Lumières pousse la réflexion plus loin. Emmanuel Kant distingue trois grands groupes d’arts : ceux de la parole, ceux de l’espace, ceux du mouvement. Hegel affine encore cette structuration, pour aboutir à la fameuse liste de cinq, puis six arts majeurs.

Pour y voir clair, voici les disciplines qui composent ce socle historique :

  • architecture
  • sculpture
  • peinture
  • musique
  • poésie (puis littérature)
  • danse (ou arts de la scène)

À chaque époque, la classification des arts évolue, témoin de tensions, d’influences nouvelles, ou de mutations profondes dans l’histoire de l’art. Rien de figé : ce classement dévoile autant nos rapports à la création qu’à l’organisation de la société.

Les 6 arts majeurs : panorama, spécificités et exemples emblématiques

Regardons concrètement ce qui compose ces six arts majeurs. Chacun se distingue par ses règles, ses langages, ses œuvres emblématiques qui jalonnent le temps.

  • Architecture : ce domaine façonne les horizons, sculpte la lumière, cristallise des ambitions ou des rêves collectifs. La Fondation Louis Vuitton à Paris, imaginée par Frank Gehry, en est un témoignage : ce bâtiment mêle prouesse technique et élan créatif, défi aux conventions.
  • Sculpture : tout l’art du volume, du relief, du toucher aussi. Les soldats en terre cuite de l’armée de Qin Shi Huang en Chine restent un exemple saisissant de la façon dont une civilisation immortalise ses mythes et ses héros.
  • Peinture : chaque tableau est une fenêtre sur un monde intérieur, une émotion arrêtée pour l’éternité. Un Van Gogh (Autoportrait au chapeau de feutre), un Léonard de Vinci (La Vierge aux rochers) : ici, le regard franchit frontières et époques.
  • Musique : l’art du temps, du rythme, de la vibration. Des compositions de Beethoven jusqu’aux mélodies de Serge Gainsbourg, la musique touche, rassemble, fait surgir l’indicible sans aucun mot.
  • Littérature : roman, théâtre, poésie, la littérature remue l’imaginaire du collectif, bouscule la langue et la pensée. Victor Hugo, Molière, Apollinaire (avec ses Calligrammes) : des phares pour tous ceux qui rêvent, s’évadent ou s’opposent grâce aux mots.
  • Arts de la scène : la danse, le théâtre, même le cirque ou le mime : ici, les corps font sens, l’espace devient partage. On pense à Joël Pommerat et à sa réinterprétation du Petit Chaperon Rouge, qui fait basculer le spectateur, renouvelant à chaque fois l’expérience du spectacle vivant.

Dans chaque ville, des musées, salles de concert ou théâtres témoignent de cette histoire vivante : seul compte ce dialogue entre patrimoine et invention, entre héritage et expérimentation, entre arts visuels et langages du corps.

Artiste et enfants en plein air dans un parc urbain

Pourquoi la notion d’arts majeurs façonne notre regard sur la culture aujourd’hui ?

Difficile de prétendre que la notion d’arts majeurs a perdu de son impact sur la façon dont on évalue ou met en lumière la création contemporaine. Venue de débats séculaires, cette liste évolue au fil des influences, bousculée par l’émergence de nouveaux supports et de nouvelles pratiques. Le cinéma a ainsi décroché le rang de « septième art », quand le jeu vidéo ou le multimédia s’imposent aujourd’hui dans des collections publiques autrefois réservées aux formes plus classiques.

Pour saisir toute l’ampleur du phénomène, il suffit de regarder ces domaines qui, au fil du XXe siècle, ont conquis leur place :

  • Cinéma, photographie, bande dessinée : longtemps relégués au rang d’arts populaires, ils occupent aujourd’hui une place de choix dans les musées, institutions ou grands rendez-vous culturels.
  • Radio, télévision, arts numériques : leur reconnaissance récente illustre à quel point la technologie bouleverse la façon dont on classe et considère la création artistique.

Au fond, chaque discipline qui rejoint ou demande à rejoindre la liste affirme une légitimité, réclame l’attention critique, le droit à la valorisation et parfois à une forme de soutien public. Les débats actuels sur la légitimité de la gastronomie, du design, de la mode ou de la parfumerie, démontrent combien la frontière entre art et savoir-faire artisanal reste mouvante, sans cesse renégociée.

Impossible donc d’enfermer la création dans des cases définitives. La liste des arts majeurs change, traduit le pouls d’une époque, reflète l’essor du numérique, la montée du jeu vidéo, l’irruption de formes hybrides dans les musées et les scènes. S’interroger sur cette classification, c’est reconnaître à la culture son mouvement perpétuel, celui qui donne à chaque génération la liberté d’ouvrir la porte à de nouveaux possibles.

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